Rapport de l'ASN 2023

En décembre 2020, EDF, en collaboration avec Framatome, Orano et l’Andra, a mis à jour ses perspectives de gestion du « cycle du combustible » selon des scénarios de mix énergétique cohérents avec la PPE publiée en avril 2020. Ces perspectives ont été substantiellement reconsidérées au regard des orientations données depuis à la politique énergétique française ; des travaux prospectifs de simulation sont régulièrement présentés à l’ASN par les exploitants concernés, notamment dans le cadre d’auditions conjointes d’Orano et d’EDF par le collège de l’ASN. Au regard des perspectives quantitatives résultant de l’éventail des scénarios considérés, et des marges réduites que présentent les piscines du site de La Hague, il apparaît un risque de saturation des capacités d’entreposage de combustibles usés dès le début des années 2030, voire avant en cas de dysfonctionnement majeur d’une ou plusieurs installations du « cycle ». L’ASN souligne la nécessité que les installations du « cycle » et les capacités d’entreposage associées présentent des marges significatives par rapport aux différents scénarios énergétiques envisagés, et vis-à-vis des aléas susceptibles d’affecter leur fonctionnement opérationnel. EDF a annoncé en 2020 un report de la mise en service de son projet de piscine d’entreposage centralisée à 2034 au mieux. Cela rend nécessaire le déploiement de parades pour faire face au retard de ce projet : ces parades sont la densification des piscines d’entreposage de La Hague, l’entreposage à sec des combustibles usés et l’utilisation accrue de combustible MOX en réacteur. L’ASN rappelle qu’aucune de ces parades ne présente les mêmes avantages établis en matière de sûreté que le projet de piscine d’entreposage centralisé, qui reste à ce jour une solution de référence, sans alternative équivalente sur le plan de la sûreté. Après les dysfonctionnements concernant certaines étapes du « cycle du combustible » qui se sont manifestés et aggravés en 2021, la situation en 2023 est en voie d’amélioration mais demeure fragile : ∙ un plan d’action est mis en œuvre par Orano depuis 2019 pour surmonter les difficultés de production de Melox. L’utilisation d’une poudre d’uranium appauvri dite «voie humide» a pu être qualifiée en septembre 2022. La production de l’usine Melox en 2023 a ainsi pu être significativement supérieure à celle de 2022. La production de matières radioactives contenant du plutonium non conformes pour une utilisation comme combustible dans des réacteurs, qualifiées de « rebuts MOX », a également diminué. L’utilisation de cette poudre « voie humide » permet ainsi d’améliorer la situation, dans l’attente de l’utilisation d’une poudre d’uranium comparable provenant d’un nouvel atelier appelé « nouvelle voie humide » (NVH) de l’usine Orano de Malvési, dont la qualification est programmée en 2024 ; ∙ les difficultés de production de Melox entraînent toujours une saturation plus rapide que prévu des capacités d’entreposage des matières plutonifères, qui nécessite la création de nouveaux locaux d’entreposage pour ces matières à La Hague. Une première extension a été autorisée par l’ASN en avril 2022, une seconde en avril 2023 et une troisième est en cours d’instruction par l’ASN; ∙ le remplacement des évaporateurs concentrateurs de produits de fission (chantier « NCPF ») de l’usine UP3-A a été achevé en 2023, et le remplacement de ceux de l’usine UP2-800 est prévu en 2024 ; ∙ le dossier de demande d’autorisation de densification des piscines de La Hague, déposé fin décembre 2022, est en cours d’instruction. Ce projet, consistant à remplacer les paniers actuellement utilisés dans les piscines C, D et E par des paniers plus compacts et dans le respect des limites fixées par les décrets d’autorisation de création (DAC) des INB 116 et 117, constitue une des parades pour faire face au retard de la mise en service d’une piscine d’entreposage centralisée. 1.5 PERSPECTIVES: LES INSTALLATIONS EN PROJET Projet de « nouvelle concentration des produits de fission » (NCPF) sur le site de La Hague Afin de remplacer les évaporateurs concentrateurs de produits de fission de La Hague qui présentent une corrosion plus avancée que prévu à leur conception, Orano construit de nouveaux ateliers, nommés « NCPF », comprenant six nouveaux évaporateurs. Ce projet particulièrement complexe a nécessité plusieurs autorisations et a fait l’objet d’une décision de l’ASN en 2022 portant sur la mise en service de trois de ces évaporateurs (NCPF T2) en vue d’un démarrage en mars 2023. Ceux-ci ont été construits et mis en service conformément au planning prévu par l’exploitant. L’autorisation de mise en service des trois autres évaporateurs (NCPF R2) est envisagée en 2024. Construction de nouvelles capacités d’entreposage de colis de déchets sur le site de La Hague Afin d’anticiper la saturation des capacités d’entreposage des CSD‑V (ateliers R7, T7 et E/EV/SE), la construction de nouveaux ateliers d’entreposage dits « extension d’entreposage des verres sur le site de La Hague» (E/EV/LH) a commencé en 2007. Ces ateliers sont constitués module par module, par construction successive d’unités identiques appelées « fosses ». Le 8 septembre 2022, l’ASN a autorisé l’introduction de colis de déchets radioactifs dans la fosse 50 de l’atelier E/EV/LH2. La fosse 60 est en construction pour accroître la capacité d’entreposage. Par ailleurs, une extension de l’entreposage de CSD‑C, autorisée par le décret du 27 novembre 2020, est en cours de construction ; la première introduction de substances radioactives dans cette extension est envisagée en 2025 après autorisation délivrée par l’ASN. En 2023, Orano a déposé une demande de modification substantielle du DAC de l’INB 116 (UP3-A) pour accroître la capacité d’entreposage de colis de déchets CSD-C et de colis de déchets CSD-V. Cette demande fera l’objet d’une enquête publique. Projet d’extension de l’unité nord de l’usine George Besse II sur le site du Tricastin En juillet 2022, Orano a transmis à l’ASN un dossier d’options de sûreté (DOS) portant sur un projet d’extension de l’unité Nord de l’usine GB II afin d’augmenter la capacité de production de l’usine d’environ 30 %. L’ASN a pris position sur le dossier le 7 février 2023. Une concertation préalable a été organisée sur ce projet par Orano, sous l’égide de la Commission nationale du débat public (CNDP) du 1er février au 9 mars 2023. Les garants désignés par la CNDP ont remis le bilan de la concertation le 9 mai 2023 auquel Orano a répondu le 13 juin 2023, en indiquant souhaiter poursuivre le projet. Le 19 juin 2023, Orano a déposé une demande de modification du DAC afin d’augmenter la capacité de production de l’usine GB II d’environ 30 %. La demande est en cours d’instruction par l’ASN et fera l’objet d’une enquête publique en 2024. Projet de piscine d’entreposage centralisé d’EDF à La Hague Lors du débat public préalable à la 5e édition du Plan national de gestion de matières et déchets radioactifs (PNGMDR) qui a eu lieu en 2019, EDF a réaffirmé que sa stratégie d’augmentation des capacités d’entreposage de combustibles usés repose sur la construction d’une nouvelle piscine d’entreposage centralisé. Cette nouvelle installation doit permettre l’entreposage des combustibles usés dont le retraitement ou le stockage ne sont envisageables qu’à long terme. La durée d’exploitation envisagée pour cet entreposage est donc de l’ordre du siècle. Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2023 339 • 12 • Les installations du « cycle du combustible nucléaire » 12 05 15 08 11 04 14 06 07 13 AN 03 10 02 09 01

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