Rappel de la législation relative aux lanceurs d’alerte
Pour que je puisse être considéré(e) comme lanceur d’alerte selon la loi et bénéficier du régime de protection afférent, il faut que :
- Je réponde à la définition du lanceur d’alerte, c’est-à-dire que :
- je sois une personne physique, c’est-à-dire que je n’effectue pas le signalement en tant qu’entreprise, ONG, association… ;
- je sois de bonne foi, c’est-à-dire qu’à la lumière des informations dont je dispose, j’ai des motifs raisonnables de croire que les faits que je signale sont véridiques et peuvent, à mon sens, porter préjudice à l’intérêt général, par ailleurs, je n’agis pas avec l’intention de nuire ;
- je ne retire pas une contrepartie financière directe de mon signalement ;
- je signale des informations sur des faits ayant un caractère criminel ou délictuel ou portant sur une violation ou une tentative de dissimulation d’une violation d’une règle de droit, sur une menace ou un préjudice pour l’intérêt général ;
- les faits, informations ou documents communiqués, quel que soit leur forme ou leur support, ne soient pas couverts par le secret de la défense nationale, le secret médical, le secret des délibérations judiciaires, le secret de l'enquête ou de l'instruction judiciaires, ou le secret professionnel de l’avocat ;
- j'ai une connaissance personnelle des faits lorsque ceux-ci n’ont pas été obtenus dans le cadre de mes activités professionnelles,
- et que je respecte la procédure prévue par la loi pour lancer une alerte, précisée ci-après.
Quel régime de protection pour les lanceurs d’alerte et leur entourage ?
Les possibilités d’exonérations de responsabilité
Au plan pénal, n’est pas responsable une personne portant atteinte à un secret protégé par la loi - autre que l’un des secrets rappelés ci-dessus - sous réserve que cette divulgation :
- soit nécessaire et proportionnée à la sauvegarde des intérêts en cause,
- intervienne dans le respect des procédures de signalement définies par la loi Sapin 2,
- et émane d’une personne répondant aux critères de définition du lanceur d'alerte rappelés ci-dessus.
En matière de responsabilité civile, un lanceur d’alerte ne pourra pas être inquiété civilement pour les préjudices que son signalement de bonne foi aura causés dès lors que ce dernier était nécessaire à la sauvegarde des intérêts en cause.
Liste des mesures de représailles, des menaces et des tentatives de recours à ces mesures dont les lanceurs d’alerte ne peuvent faire l’objet pour avoir signalé ou divulgué des informations dans les conditions prévues par la loi.
L’article L. 1121-2 du code du travail pour les salariés, l’article L. 135-4 du code général de la fonction publique pour les agents publics et, pour les autres personnes, le II de l’article 10-1 de la loi Sapin 2 dressent une liste des mesures de représailles interdites.
Possibilité d’obtenir un soutien financier auprès du juge
L’auteur d’un signalement, présentant des éléments de fait laissant supposer qu'il a effectué ce dernier dans les conditions prévues par la loi, peut demander au juge de lui allouer une provision pour frais de l’instance.
Celle-ci peut être allouée dans les situations suivantes :
- lorsque l’auteur du signalement a formé un recours contre une mesure de représailles ;
- au cours d'une instance civile ou pénale, lorsqu’une procédure visant à entraver le signalement a été engagée contre l’auteur de ce dernier.
Protection de l’entourage des lanceurs d’alerte
Certaines protections offertes aux lanceurs d’alerte (protection contre les mesures de représailles, exonérations de responsabilités pénale et civile…) peuvent également bénéficier :
- aux « facilitateurs » c’est-à-dire « toute personne physique ou toute personne morale de droit privé à but non lucratif qui aide un lanceur d'alerte à effectuer un signalement ou une divulgation dans le respect des articles 6 et 8 » de la loi Sapin 2 ;
- aux personnes physiques en lien avec un lanceur d’alerte qui risquent de faire l'objet d’une mesure de représailles « dans le cadre de leurs activités professionnelles de la part de leur employeur, de leur client ou du destinataire de leurs services ».
En savoir plus :
- Guide du lanceur d’alerte publié par le Défenseur des droits
- Directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union
- Chapitre II « De la protection des lanceurs d'alerte (Articles 6 à 16) » de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (dite Loi Sapin 2) dans sa version issue de la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte
- Loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits (cf. articles 4, 11, 35-1 et le II de l’article 36) dans sa version issue de la loi organique n° 2022-400 du 21 mars 2022 visant à renforcer le rôle du Défenseur des droits en matière de signalement d'alerte
- Décret n° 2022-1284 du 3 octobre 2022 relatif aux procédures de recueil et de traitement des signalements émis par les lanceurs d'alerte et fixant la liste des autorités externes instituées par la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte
- Article 122-9 du code pénal.
Quel est le mode de réception, de traitement et de suivi des signalements externes reçus par l’ASN ?
Contenu des signalements
Lors du signalement, son auteur fournit des informations sur des faits de nature criminelle ou délictuelle, sur une violation ou une tentative de dissimulation de violation d’une règle de droit ou sur une menace ou un préjudice pour l’intérêt général et les circonstances dans lesquelles il a eu connaissance de ces éléments. Il complète son signalement par une communication de tout élément ou document utile dont il dispose permettant d’étayer celui-ci, quel que soit son support ou sa forme. Il précise s’il a ou non transmis son signalement par la voie interne à son organisation.
Accusé de réception
À l’exception des cas où il est effectué de manière anonyme, l’ASN accuse réception du signalement dans un délai de 7 jours ouvrés à compter de sa réception, sauf demande contraire expresse de l’auteur du signalement ou si l’ASN a des motifs raisonnables de croire qu’accuser réception compromettrait la confidentialité de l’identité de son auteur.
Traitement des signalements
Tout signalement fait en premier lieu l’objet d’une vérification de sa compétence par l’ASN et, dans un deuxième temps, d’un examen de recevabilité au regard des dispositions de l’article 6 de la loi Sapin 2.
L’ASN vérifie notamment, au regard des informations dont elle dispose, que l’auteur du signalement entre bien dans la définition du lanceur d’alerte décrite précédemment et que les informations transmises ne sont pas couvertes par l’un des secrets également mentionnés ci-dessus. Elle communique son analyse à l’auteur du signalement. Lorsqu’elle estime que ce dernier ne respecte pas les conditions posées par la loi Sapin 2, elle lui indique les raisons et qu’il devrait ne pas pouvoir bénéficier du régime de protection des lanceurs d’alerte prévu par cette même loi, sous réserve de l’avis sur la qualité de lanceur d’alerte que pourrait rendre le Défenseur des droits sur demande de l’intéressé.
Tout signalement relevant de la compétence de l’ASN donne lieu à une évaluation de l’exactitude et des enjeux des allégations qui y sont formulées, et fait l’objet d’un traitement adapté. Il pourra s’agir d’actions de contrôle par les inspecteurs de l’ASN.
Un signalement ne relevant pas de la compétence de l’ASN est transmis à l’autorité compétente ou au Défenseur des droits, dans des conditions permettant de garantir l'intégrité et la confidentialité des informations qu'il contient. L’auteur du signalement est informé de cette transmission.
Suivi des signalements et information des auteurs de signalements
Dans les 3 mois à compter de l’accusé de réception ou, à défaut d’accusé de réception, dans les 3 mois à compter de l’expiration de la période de 7 jours suivant le signalement, sont communiquées à l’auteur du signalement des informations sur les suites données à ce dernier. Celles-ci portent notamment sur les mesures envisagées ou prises pour évaluer l'exactitude des allégations et, le cas échéant, remédier à l’objet du signalement et sur les motifs de ces dernières. Ce délai peut être porté à 6 mois en raison de circonstances particulières de l’affaire, telles la nature ou la complexité de cette dernière, nécessitant de plus amples investigations. Dans ce cas, ces circonstances sont justifiées auprès de l’auteur du signalement avant l'expiration du délai de 3 mois précédemment mentionné.
Le résultat final du traitement mis en œuvre est communiqué à l’auteur du signalement.
Le signalement devenu sans objet ou les allégations inexactes, infondées ou manifestement mineures donnent lieu à une clôture du dossier. Les allégations ne contenant aucune nouvelle information significative relative à une procédure déjà close ne donnent pas lieu à une nouvelle ouverture du dossier. L’auteur du signalement est informé de cette décision et de ses motifs.
Garanties de confidentialité et protection des données à caractère personnel
L'ASN assure la stricte confidentialité des informations recueillies dans un signalement, notamment l’identité de l'auteur du signalement, des personnes visées par celui-ci et de tout tiers qui y est mentionné.
Les éléments de nature à identifier le lanceur d'alerte ne peuvent être divulgués qu'avec le consentement de celui-ci. Ils peuvent toutefois être communiqués à l'autorité judiciaire, dans le cas où l’ASN est tenue de dénoncer les faits à celle-ci. Le lanceur d’alerte en est alors informé avec fourniture d’explications écrites, à moins que cette information ne risque de compromettre la procédure judiciaire.
En cas de nécessité de communiquer avec des tiers aux fins de traitement du signalement, toutes les précautions sont prises pour restreindre l'accès aux informations aux seules personnes qui doivent en connaître.
La procédure donne lieu à un traitement automatisé des signalements se conformant au règlement général sur la protection des données - RGPD (règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016) et à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, notamment aux règles relatives à la protection des données à caractère personnel.
Rappel sur la faculté d’effectuer un signalement interne
Lorsqu'elles ne sont pas exposées au risque de faire l'objet d'une mesure de représailles et en l'absence de risque de destruction de preuves, les personnes physiques qui ont obtenu, dans le cadre de leurs activités professionnelles, des informations portant sur des faits qui se sont produits ou sont très susceptibles de se produire dans l'entité concernée, ont la faculté de signaler ces informations par la voie interne lorsqu’elles peuvent avoir recours à une procédure interne de recueil et de traitement des signalements.
Les personnes physiques précitées sont définies aux 1° à 5° du A de l’article 8 de la loi Sapin 2 et correspondent notamment aux membres ou anciens membres du personnel, aux actionnaires, aux associés, aux membres de l’organe d’administration, aux collaborateurs extérieurs et occasionnels, aux cocontractants, aux sous-traitants des cocontractants (ou, lorsqu'il s'agit de personnes morales, aux membres de l'organe d'administration et aux membres du personnel de ces cocontractants et sous-traitants) de l’entité concernée.
Le signalement interne n’est jamais obligatoire.